Un peu d'histoire : 10 novembre (10 Kasim)
Date de publication : Nov 10, 2015 7:3:58 AM
JE SUIS CAR IL A ÉTÉ !
Paix à ton âme Atatürk ! – Atam ruhun şad, mekanın cennet olsun !
Le 10 novembre est une date qui marque le deuil pour la nation turque. A 9h05, Mustafa Kemal Atatürk, le fondateur de la République turque, est passé de vie à trépas au Palais impérial de Dolmabahçe. Il avait 57 ans.
A 9h05, chaque année, une sirène retentit et tout le pays se fige intégralement pour observer une minute de silence. La population se statufie, la vie s’arrête, les souffles se retiennent, la circulation cesse, le silence s’impose sans réserve, et tout le pays se recueille, rendant hommage au Père de la nation. Le moment est réellement impressionnant et très émouvant. Il faut être en Turquie pour le croire et pouvoir apprécier l’affection profonde des Turcs.
Mustafa Kemal Atatürk aura marqué l’histoire de la Turquie d’une empreinte indélébile. Après l’avoir sauvée, il la projettera vers le futur en la révolutionnant profondément. Son entreprise de modernisation affectera chaque Turc jusque dans sa vie intime : son nom, sa langue et même ses vêtements. La Turquie d’aujourd’hui est celle de Mustafa Kemal Pasha, nommé ATATÜRK, le Turc-Père.
Dès 1937, la santé de Mustafa Kemal commence à se dégrader sérieusement. L’agenda extraordinairement chargé du Président Atatürk ne l’aide en rien. Devant l’insistance de son Premier Ministre, Celal Bayar, Atatürk accepte une consultation avec un médecin étranger. Ainsi, en mars 1938, l’éminent professeur français, Noël Fiessinger, vient en Turquie et diagnostique, comme ses confrères turcs, une cirrhose du foie.
Atatürk, comme pour contredire les rumeurs qui se propagent en occident sur sa santé, ne diminue rien de son dynamisme politique. Sa principale préoccupation du moment étant de récupérer du mandat des Français, le Sandjak d'Alexandrette qui deviendra la province de Hatay. Il voyage sans arrêt allant d’Ankara à Mersin, puis à Adana. Il participe aux célébrations, fait des discours, négocie avec les puissances étrangères, planifie, projette, met en œuvre ses réformes; bref il travaille sans interruption. Les rumeurs dans la presse occidentale cessent. Pourtant, sa santé décline.
Le 26 mai 1938, il quitte définitivement Ankara pour s’installer à Istanbul. Ses efforts acharnés, son stratagème de militaire chevronné et son habileté politique porteront leur fruit puisque Hatay devient turc en septembre.
Le 6 septembre 1938, le professeur Fiessinger revient à Istanbul et procède à des ponctions. 6 litres d’eau seront prélevés du ventre d’Atatürk.
Estimant qu’une guerre mondiale approche (et il ne se trompait pas), il finalise fin septembre un plan économique vital sur 4 ans avec son Premier ministre Celal Bayar.
Parallèlement, il rédige son testament et partage son patrimoine entre le Trésor, son parti politique, le CHP, sa sœur, ses enfants, la Société de la Langue Turque et la Société d’Histoire Turque.
Chaque jour, sa santé régresse, et la rétention d’eau augmente dans son ventre. Malgré les interventions médicales, il plonge dans un coma profond le 6 octobre. Il en sortira le 21. Malgré son ardent désir, il ne pourra participer, cette année-là, aux cérémonies de la fête de la République, le 29 octobre. Celal Bayar lira, pour lui, le discours qu’il avait préparé. En son absence, les célébrations auront un arrière-goût de tristesse. Pourtant, les élèves du célèbre Lycée militaire Kuleli exigeront du capitaine de bateau qu’il s’arrête devant les fenêtres du Palais de Dolmabahçe afin de saluer leur héros. Malgré l’extrême fragilité de sa santé, Atatürk, ému, ira jusqu’au balcon pour faire un signe de la main aux jeunes soldats en garde à vous.
Le 7 novembre, une dernière ponction est réalisée. Le lendemain, Atatürk se réveille, dit « bonjour » à son médecin, le Dr Neşet Ömer İrdelp et plonge dans le coma.
Il rend son dernier souffle le jeudi 10 novembre 1938 à 9h05.
Depuis, cette date, le 10 novembre, et précisément cette heure, 9h05, ravivent une triste émotion chez les Turcs qui commémorent dignement leur sauveur en respectant une minute de silence.
A mon tour, en France, je me courberai humblement durant une minute, à 9h05, devant la mémoire de cet homme exceptionnel qui a fait qu’aujourd’hui, non seulement, j’existe mais je suis fier de mon identité.
Atam ruhun şad, mekanın cennet olsun !
« Je ne laisse en tant qu’héritage spirituel aucun verset, aucun dogme, aucune règle pétrifiée et figée. Mon héritage spirituel se résume dans la Science et la Raison. » - Mustafa Kemal Atatürk
Özcan Türk